La Leaf fait peau neuve
Voiture électrique : Nissan repart à la charge
Lors de la présentation, il y a sept ans, de la première génération de sa Leaf, Nissan avait suscité la consternation chez ses concurrents. Et parfois même la moquerie. "Ils pensaient tous que nous étions fous", se souvient aujourd’hui Daniele Schillaci, le responsable du développement des véhicules électriques de Nissan. "Mais maintenant, tous ont suivi notre direction", note le cadre. Il a assisté, en septembre, à Tokyo, au lancement de la nouvelle génération de la compacte tout électrique de la marque japonaise. Commercialisée depuis début octobre dans l’Archipel au prix de 3,15 millions de yens, avant son lancement en Europe et aux États-Unis début 2018, la Leaf doit permettre au constructeur de retrouver son leadership sur le marché de masse des véhicules à zéro émission, dont il fut longtemps le seul grand acteur. "Quand la Leaf est sortie en 2010, Nissan était dans son ère romantique, se gargarisant de phrases comme "nous serons les leaders de la voiture zéro émission", ou encore "nous allons combiner véhicule électrique et maison intelligente", a noté le Nikkei, d’ordinaire bienveillant, lors de la sortie de ce nouveau modèle.
Ces derniers trimestres, tous les constructeurs de la planète ont annoncé leur conversion à cette énergie et dévoilé d’ambitieux plans d’électrification de leurs gammes, souvent bousculés par l’engouement soudain pour les berlines de Tesla. Le groupe allemand Volkswagen vient notamment de promettre l’introduction d’une cinquantaine de modèles purement électriques d’ici 2025 sous ses différentes marques. Il a indiqué qu’il investira 20 milliards d’euros dans cette transition qu’il estime fulgurante. Les analystes semblent, eux, croire à une transformation plus graduelle. Selon IHS Markit, les véhicules électriques ne devraient représenter que 3,4% de la production automobile mondiale en 2025, soit un peu moins de quatre millions d’unités quand les modèles essence ou diesel représenteront encore 70% des ventes.
TRIPLER LES VENTES
Pesant ces différentes estimations, Hiroto Saikawa, le nouveau PDG de Nissan, se fixe des objectifs mesurés. Alors que la Leaf de première génération ne s’est écoulée qu’à environ 300.000 exemplaires en sept ans, il croit pouvoir vendre près de 100.000 unités du nouveau modèle chaque année, ce qui en ferait l’un des véhicules les plus populaires sur ce segment, aux côtés de la Model 3 de Tesla. Cette dernière s’est positionnée depuis le début sur le segment des véhicules de luxe. La Leaf se veut la voiture du marché de masse face à sa petite sœur californienne, même si certains préféreraient que Nissan "électrifie" sa gamme de luxe Infinity, lui offrant une plus grande valeur ajoutée. "Sur des marchés très attirés par les nouveautés technologiques, comme le Japon, il n’est pas impensable d’atteindre un triplement des ventes par rapport à la première Leaf", explique Hiroto Saikawa, qui voit les exigences de la clientèle muer
progressivement. "La compétition va se faire sur les caractéristiques de la voiture elle-même et plus seulement comme avant sur l’autonomie de la batterie”, insiste le successeur de Carlos Ghosn à la direction du géant japonais.
Avec une autonomie annoncée à 378 kilomètres contre 250 kilomètres sur la première Leaf, selon la norme européenne NEDC, Nissan pense avoir apaisé l’anxiété potentielle des conducteurs. Le constructeur communique désormais sur les autres éléments technologiques de son modèle. Le groupe a ainsi installé dans sa Leaf son dispositif e-Pedal qui permet de fusionner en une seule pédale le frein et l’accélérateur. Il mise aussi beaucoup sur son système de conduite semi-autonome ProPilot, déjà présent sur d’autres modèles, et enrichi, pour l’occasion, d’une fonction parking accompagnant les conducteurs au moment de garer leur auto dans des espaces restreints. "Ce sont ces innovations qui vont nous différencier", assure Daniele Schillaci, qui espère ainsi capter l’attention de tous les acheteurs potentiels de voitures compactes, et pas seulement celle des convertis à l’électrique. Nous sommes bien à l’orée de la popularisation mondiale des voitures électriques. Selon Ken Shin, de CLSA, le coût de production des batteries d’ici 2023 au plus tard aura baissé assez pour que le coût d’une voiture électrique soit similaire à celui d’une voiture à essence. Et le coût de la maintenance et du carburant se sera effondré.